Passer au niveau professionnel

Le poker sur Internet a permis à beaucoup d’entre nous d’améliorer considérable notre jeu. Avec le monde comme champ de jeu et des dizaines de milliers d’adversaires potentiels, nous nous sommes retrouvés surentraînés, dopés à un niveau tel que nous ne l’atteindrions jamais si nous avions continué à fréquenter les petits cercles privés ou les salles des casinos. Petit à petit, nos gains ont commencé à dépasser nos pertes, et nous nous retrouvons à la tête d’une confortable somme. Il est alors normal de se dire : pourquoi ne pas tout abandonner, et faire du poker une occupation à plein temps ?

La démarche mérite toutefois des réflexions approfondies. Lorsque l’on décide de changer de travail dans la vie réelle, on ne prend pas la décision à la va-vite, on prend la peine de consulter sa famille, ses amis, ses collègues. Devenir pro relève du même niveau de difficulté, à l’exception du fait que nos amis ou notre famille ne perçoivent sans doute pas toute la complexité de ce qu’il faut réaliser pour passer pro.

Avant tout, je suppose que vous avez un niveau extrêmement élevé. Si vous avez des doutes sur votre niveau, ce n’est même pas la peine. Quand c’est votre revenu même qui est en jeu, l’heure n’est plus aux tâtonnements. La perte doit être totalement minimisée.

La première chose à oublier, c’est le mythe de l’argent facile. Gagner sa vie en jouant n’est pas plus facile que d’aller au bureau tous les jours. C’est même plus difficile, car la première qualité exigée – en plus d’une passion absolue pour le poker, sans quoi on risque très vite d’être saturé, bien sûr – est d’avoir une volonté de fer. Un simple amateur peut jouer quand il le veut et s’arrêter à tout moment. Un pro se fixe des objectifs et doit absolument les réaliser. Aucun laisser-aller ne doit être permis. Il va falloir couper le téléphone portable, oublier les amis qui viennent boire un petit coup, la descente au bistrot. La vie d’un professionnel est loin d’être des vacances perpétuelles. Avec Internet, ce ne sont plus vos soirées, mais toutes vos journées qui y passent. Et quand vous ne jouez pas au poker, vous analysez vos parties passées ou les jeux de vos adversaires avec des logiciels. Quand vous ne faites pas cela, vous vous plongez dans des livres de stratégie, ou encore vous parcourez l’Internet à la recherche de bonus potentiellement intéressants.

La seconde qualité à avoir est d’être un bon gestionnaire. Il faut que vous sachiez en toute honnêteté ce que vous pouvez gagner, et ajuster votre niveau de vie en permanence. Il faut savoir que le gain d’un jour servira à compenser plusieurs jours, voire semaines, de vaches maigres. Si vous êtes plutôt un flambeur, passez votre chemin. En plus d’avoir suffisamment d’argent au départ (condition absolue, car il va falloir participer à des tournois sans aucune garantie de gains), il va également falloir gérer minutieusement vos gains. Sans compter que la plupart des joueurs oublient qu’en fin d’année, il va également falloir donner sa part au fisc. Enfin, dernière chose, n’espérez pas devenir millionnaires. Avec un excellent niveau, vous pourrez gagner de quoi vivre confortablement, mais il faut savoir que les grands coups, ceux qui font parler les journaux et les télés, ne sont vraiment réservés qu’aux meilleurs, et que ceux-là vont défendre farouchement leurs places.